Alpha – Théâtre

Chaque saison, durant quinze jours, nous développons un travail théâtral dans les cours d’’alphabétisation du Miroir Vagabond. Ce travail est le fruit d’’une collaboration qui regroupe 160 personnes qui suivent ces cours dans deux bibliothèques de deux communes voisines, Hotton et Marche-en-Famenne. Le public est principalement constitué de demandeurs d’’asile des 5 centres de réfugiés qui sont sur notre territoire, mais aussi des étrangers régularisés, des flamands venus vivre en Wallonie et des francophones qui n’’ont pas l’’acquis de la lecture et de l’écriture.

Nous proposons donc 2 ou 3 semaines de théâtre en encourageant la participation collective à un moment ludique et surprenant. Tous les apprenants sont invités à approcher le théâtre. Après une initiation proposée à l’’ensemble des participants, un groupe de 30 à 40 volontaires s’’engage à travailler toute la journée de 9h à 16h30. Une grande souplesse et une attention aux obligations ou rythmes de vie de chacun sont nécessaires au bon fonctionnement d’’un tel projet.

Alpha 2017: Rhinocéros

 

Patrick Navatte, ancien metteur en scène du Théâtre des Travaux et des Jours:

« Je veux souligner que ce projet n’’est possible que si toute une équipe se met au travail ensemble : Les responsable des formations en alphabétisation, les professeurs bénévoles, les acteurs/moteurs (qui font partie de mon équipe, qui jouent avec le groupe et qui sont des passeurs de la dynamique de travail et un relais entre moi, metteur en scène/animateur et les apprentis acteurs), une plasticienne qui s’’occupe du décor ou d’’éléments de décor et des costumes, des travailleurs du Miroir Vagabond qui font les covoiturages pour ramener les gens dans les centres souvent éloignés des centres villes et inaccessibles en transports en commun et le personnel de la bibliothèque quand l’’activité se passe à l’’intérieur même du lieu bibliothèque. C’’est vraiment toute une équipe qui se réunit pour la réussite d’’un tel projet.

Cela fait plusieurs années que je fais du théâtre avec les groupes d’’Alpha et encore un peu plus d’’années que je travaille dans les centres de réfugiés de demandeurs d’’asile. Je peux dire que cela a été un tournant dans mon parcours, ma vie de théâtre et ma vie tout court.

J’’ai vu concrètement que la rencontre, le travail collectif, le théâtre sont des facilitateurs du vivre ensemble. J’ai vu aussi que « le faire ensemble » va au-delà des peurs, des conflits. Jamais je n’’ai vécu de tensions entre des nationalités ou des ethnies qui ont été ou sont en conflit (par exemple des russes et des tchétchènes ou des hutus et des Tutsies venant du Rwanda).

Je crois fondamentalement au théâtre comme un art transformateur, qui développe un vrai rapport humain au-delà des représentations et clichés que l’’on peut avoir de l’’autre.

Je crois au théâtre comme vecteur de lien social : quand nous proposons aux habitants d’’une commune de partager un moment de théâtre avec des demandeurs d’’asile, les images négatives s’’estompent, certaines peurs et à priori tombent et nous pouvons envisager le début d’’un débat constructif pour le vivre ensemble sur un même territoire. »